Cher Océan, je ne
vous connaissais pas jusqu'à hier. J'ai lu un article dans le media citoyen
Panamza racontant votre "lynchage" à la télé, puis j'ai regardé
le passage sur youtube, et finalement j'ai lu votre tribune en défense de Houria
Bouteldja dans Libération. Belle, simple, et claire.
Votre réaction à la télévision,
admirable de spontanéité et tellement magnanime face à une attaque imprévisible
mais préméditée (comme Christine Angot le reconnait froidement) m'a touché. Vous
n'avez rien lâché sur le fond, et vos adversaires (auto-déclarés) ne méritaient
pas la grâce avec laquelle vous les avez protégés de leurs propres émotions.
Une phrase résume
à mes yeux leur numéro de duettistes: "Il n'y a pas de point de
vue", affirme Christine Angot, reprise par Franz-Olivier Giesbert, qui agissait
en parfaite symbiose mais sans prendre d'initiative, comme un chien d'attaque perçoit
les sentiments de son maitre.
C'est la même
phrase avec laquelle l'armée israélienne justifie d'avoir écrasé Rachel Corrie
sous un bulldozer blindé: "le soldat ne l'a pas vue". Effectivement,
il n'a probablement pas vu Rachel Corrie. Il n'a pas vu un être humain, mais
une cible. C'est l'attitude du médecin nazi qui examine les dents de Primo Levi
comme s'il n'était pas un être humain mais un animal (Si c'est un homme). C'est
le sentiment qui habitait les européens obsédés par "la question
juive" il y a presque 100 ans, et leurs héritiers aujourd'hui, obsédés par
d'autres fantasmes, mais sacrifiant les mêmes victimes. Car les victimes sont
toujours les mêmes, seul leur nom change. Ce sont toujours celles et ceux dont la parole
n'est pas légitime, dont le point de vue n'existe pas, car "il n'y a
pas de point de vue", disent leurs oppresseurs.
Cet épisode fait
partie de ces moments de vérité, qui révèlent aux yeux de tous que nous ne
pouvons jamais éviter d'agir selon nos valeurs, selon ce que nous croyons vraiment,
même lorsque nous essayons de nous les cacher. Vos agresseurs refusent de
comprendre car ils ne sentent que trop bien que votre phrase les met à nu,
mais ils n'ont pas le courage de comprendre pourquoi. "Il n'y a pas de
point de vue" répètent-ils. Ils voudraient être transparents, "neutres",
ainsi il n'y aurait pas besoin de regarder disent-ils, "les choses sont
la", comme elles sont. Pas besoin de faire un effort. Mais vous avez le
courage de regarder, non seulement avec les yeux mais avec le cœur, comme
disait Saint-Exupéry.
La grâce de votre
spontanéité et de votre calme restent une leçon pour moi.
Laurent Fournier
http://www.panamza.com/041118-angot-giesbert-ocean/
https://www.liberation.fr/debats/2016/05/30/qui-a-peur-de-houria-bouteldja_1456167
Note (16-11-2018): les media israeliens sont beaucoup plus francs, beaucoup moins hypocrites que les francais, si typiquement representes par les deux comparses cites plus haut. Lisons Uri Avneri, Yeshayahu Ben-Aharon, Yeshyahu Leibowitz, qui vivent (vivaient) en Israel, et qui acceptent (aient) pleinement les risques et la responsabilite de leurs actes, contrairement a un editorialiste suffisant se donnant en spectacle en "tremblant" sur un plateau tele a Paris, et jetant de l'huile sur le feu d'un conflit dont il ne court pas le risque de souffrir. Mais pour qui se prend-t-il? Connais-t-il le prix d'etre un journaliste en Palestine?
Lisons particulierement Uri Avneri, et son dernier article, publie 2 semaines avant sa mort cet ete:
https://www.veteranstoday.com/2018/08/07/who-the-hell-are-we-uri-avnery/
Yeshayahu Ben Aharon:
http://www.academia.edu/1056459/A_Revolutionary_Son_of_a_Revolutionary
Ben Aharon dit franchement que la toute premiere condition pour que la paix soit possible est qu'Israel cesse de se considerer comme le poste avance de la colonisation occidentale - Il est donc bien d'accord avec Ocean, non?
Yeshayahu Leibowitz (lu ce matin):
https://www.rt.com/news/443954-judeo-nazis-chomski-leibowitz/